Chambre n° 10 : le capharnaüm d'Alma

Alma entra dans sa chambre, la nuit était déjà très avancée. Elle s'était promenée en ville, d'une humeur particulièrement mélancolique ce soir-là. Elle referma la porte et fit face au Chaos. L'armoire, les deux portes grandes ouvertes, vomissait littéralement des vêtements, des livres et des couteaux. Le lit était défait et les draps s'emmêlaient sur le sol. La jeune femme ne put retenir un soupir de consternation. Le bureau croulait sous les ouvrages, certains traitant du droit, d'autres psychologie (comme la gestion de la schizophrénie), quelques uns de philosophie et tous les ouvrages de la famille Rougon-Macquart.

La jeune femme avança en faisant de grandes enjambées dans la pièce. Son sabre qui tenait en équilibre sur une pile de livres, fut déstabilisé par un léger mouvement de sa main. Il vacilla avant de tomber, entrainant dans sa chute une vieille édition des pièces de Shakespeare. Alma eut alors un superbe réflexe et fit l'éviter les précieux ouvrages avant qu'ils n'aillent s'écraser sur des couteaux de lancer qui trainaient là. D'un geste, elle les reposa sur le bureau dans un équilibre précaire.

Alma : - Okay. Il faut que je range. Par où commencer ?

Son PDA vibra. Elle avait prévu de s'entrainer pendant deux heures, en pleine nuit. Elle avait constaté ses lacunes dans le combat rapproché, aussi après avoir suivi des cours avec un des grands maitres des arts martiaux, Alma travaillait encore et encore les gestes pour atteindre la perfection. Son autre moitié ne s'intéressait pas du tout au corps à corps et c'était bien là son seul défaut. Pourtant, elle maitrisait déjà de nombreuses techniques. Elle critiquait souvent Alma, l'aidant malgré elle à se perfectionner.

Je vais commencer par ce qui est à mes pieds. Suivons la sagesse ancienne qui dit : "Si tu veux soulever une montagne commence par ce qui est à tes pieds."

Elle ramassa ses vêtements tandis que son esprit rangeait les livres sur les étagères. Cette combinaison se révéla efficace, quelques minutes plus tard, tout était en ordre, sauf le lit. Alma faisait une impasse là-dessus. D'ailleurs son violon et des partitions trainaient sur les draps. Elle rassembla les feuillets dans une pochette mais son regard s'arrêta sur une portée, la partie du soliste d'un célèbre morceau de Vivaldi : l'Hiver (les Quatre Saisons).

Alma s'installa sur une chaise, instrument à la main et commença doucement à jouer. Ce morceau mélancolique lui fit presque monter les larmes aux yeux. Elle interrompit rapidement le morceau, rangea les partition et son violon dans l'étui. Ce n'était pas le moment de pleurer pour un petit coup de blues.

Elle attrapa son blouson et sortit. La nuit était propice à cet entrainement. Cela lui permettait de travail ses sens en même temps que ses gestes. La jeune femme se retourna et contempla sa chambre, parfaitement rangée, mise à part un livre qui trainait sur le bureau et le lit en bataille. Hochant la tête pour elle même, elle sortit, ferma la porte et traversa silencieusement le couloir pour ne pas réveiller les agents en plein sommeil.